Droits de l’homme

 

 

Depuis 1989, et durant vingt ans dans son poste de Secrétaire général de la Commission nationale des droits de l’homme auprès du Premier ministre, Gérard Fellous s’est trouvé aux premières lignes de tous les combats, nationaux et internationaux, pour la promotion et la défense des Droits de l’homme. Les avis donnés aux différents gouvernements qui se sont succédé durant cette période, sur de nombreux  sujets de société, les actions menées à l’international, les études et colloques organisés, ont fait l’objet de rapports annuels publiés par La Documentation française.

Quelques aspects, au fil de l’actualité, en sont rappelés dans cette rubrique non exhaustive.

 

  • 9 décembre 2010 : 60 ème. anniversaire de la Déclaration Universelle des Droits de l’homme. Grand Orient de France

 

Soixantième anniversaire de la DUDH

 

Le Grand Orient de France marquait le soixantième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme  en organisant une tenue ouverte le 9 décembre 2010.

Outre une conférence intitulée : « L’universalité des droits de l’homme mise en danger » (en voir l’intégralité ci-dessous), il m’était demandé d’évoquer le souvenir  de René Cassin, l’un des rédacteurs de la DUDH, dont je m’étais efforcer de perpétuer l’esprit et les travaux dans mes fonctions de Secrétaire général de la Commission nationale consultative des droits de l’homme (voir également plus loin).

 

 

      VIDEO 60 eme anniversaire

Grand Orient de France -20 janvier 2009…. Uniquement l’intervention de G. Fellous

 

 

VIDEO  dans  – godf gerard fellous

 

 

 

 

  • 1987- 2007- I.N.

 

Constitution du réseau

des Institutions nationales des droits de l’homme

CARNET DE VOYAGE

 

Parmi les nombreuses rencontres internationales et régionales des Institutions nationales des droits de l’homme que nous avons organisées ou auxquelles nous avons participé entre 1987 et 2007, dans le cadre de nos fonctions, nous en avons retenu quelques- unes, en une recherche impressionniste de souvenirs

v GENEVE –Nations unies :

 

Chaque année, entre 1995 et 2007, nous nous sommes rendus aux Nations unies, à Genève, afin de participer aux sessions de la Commission des droits de l’homme , afin de faire évoluer le statut des Institutions nationales, et d’obtenir une meilleure participation aux travaux onusiens, aux côtés des Etats et des ONG. Au-delà des travaux en sessions annuelles ou en commissions, nous avons retenu des « impressions » dont le patchwork présenté ici dégage la couleur :

  • 1987-2004 :

 

Impressions : Genève au printemps, à chaque mois d’avril qui voit se tenir la session de la Commission des droits de l’homme, offre un contraste saisissant entre une ville calme et ordonnée autour du lac orné du panache de son jet d’eau et un Palais des Nations bondé et fébrile où se retrouvent et se mêlent des centaines de délégations. Nous y sommes régulièrement présents depuis 1987, c’est-à-dire depuis dix-huit ans.  A notre arrivée, le cérémonial est immuable : se présenter à la Villa des Feuillantines pour poser devant un appareil de photo numérique et établir un badge d’accès de couleur distincte pour les Institutions nationales. Le barrage de contrôle du bâtiment du Palais des Nations franchi, c’est l’immersion dans la cafétéria qui jouxte la salle plénière où nous retrouvons, au grès des tables basses et autour de cafés, Omar, Zainabo, Komi, Dheerujlall, Eduardo, José, Nayan, Kieren, Morten, Alice, Brice ou Orest, que nous appelons, au fil des années par leurs prénoms dans cette «  famille » des Institutions nationales qui se retrouve.

Un indéfinissable silence, sur fond de brouhaha sourd, règne dans la salle plénière de la Commission. Qui parle et de quel banc ? Impossible de le savoir en l’absence de hauts  parleurs. Seuls les retours sur des écouteurs laissés ouverts laissent supposer une intervention, si ce n’est qu’un écran géant, au-dessus de la présidence, donne le nom et la qualité de celui qui a la parole. Etrange également ce chronomètre linéaire qui égrène imperturbablement les minutes et les secondes de temps de parole qui restent à l’intervenant. Les représentants des Institutions nationales ont eu des difficultés à se plier à cet exercice qui consiste à garder un œil sur le fatidique chronomètre et un autre  sur la lecture de leur texte, sans compter le sentiment de parler dans le vide, sans que personne n’y prête attention.

Nous quittons chaque année Genève avec un double sentiment de satisfaction et d’incomplétude : heureux d’avoir retrouvé des amis de longue date et de nouveaux dirigeants d’Institutions nationales, content de voir s’enraciner chaque fois un peu plus profondément un réseau prometteur. Mais aussi déçu par la lenteur des progrès et par leur fragilité, conscient que la pleine place des Institutions nationales est encore à conquérir. Pour nous tous, le retour dans nos pays respectifs et dans notre action quotidienne nationale est stimulé par cette prise de conscience que d’autres, comme nous, tirent leur chariot dans le même sens, que nous sommes solidaires et que nous nous plaçons sous le regard de la communauté internationale.

  • 2005- 51e session : Cinquante-trois Institutions nationales- nombre record depuis leur première participation en 1995- prennent la parole en séance plénière en ce 13 avril, sur le point de l‘ordre du jour les concernant :

Impressions : Nous envisagions le pire dans une telle situation : trois places assises, en fond de salle, pour les représentants des cinquante-trois Institutions nationales, dont l’ordre de passage est fixé dans un document de séance. L’expérience des années précédentes aidant, nous nous alignons le long du mur de la salle ou occupons indûment des sièges laissés libres ici et là, en installant les trois premiers intervenants et en faisant hâtivement libérer la place de celui qui vient de s’exprimer pour faire asseoir le quatrième, et ainsi de suite. Durant plusieurs années nous assumions spontanément ce rôle de «  maître de cérémonie », pour en laisser la charge, en 2004 et 2005 à une collaboratrice du Haut- commissariat. A la fin de chaque intervention, c’est le ballet des appariteurs qui se déclenche, pour déposer sur toutes les tables, le texte du discours qui vient de s’achever.

  • Haut-commissariat aux droits de l’homme de l’ONU :

Un partenariat privilégié s’est établi, au cours de ces années, avec le Haut-commissariat aux droits de l’homme des Nations unies, siégeant à Genève au Palais des Nations.  Avec ses Haut Commissaires successifs, nous avons mis au point et fait fonctionné un bureau de liaison ainsi qu’un Comité international de coordination (CIC) des Institutions nationales.

Impressions : Pour avoir collaboré étroitement avec les responsables successifs depuis près de vingt ans, Hamid Gaham, au Centre pour les droits de l’homme, puis Brian Burdekin et Orest Nowosad pour le Bureau de liaison du Haut-Commissariat, nous avons tissé des liens de confiance et d’amitié qui ont considérablement facilité le développement des Institutions nationales et de leurs réseaux. Ces points de contact nous ont ouvert les portes du système des Nations unies, pas seulement dans le cadre de leur mission officielle, mais aussi autour d’un dîner ou d’un «  pot », après de longues réunions harassantes, pour échanger des impressions et des informations avec des personnes de haute qualité qui sont devenues les meilleurs soutiens pour nos Institutions nationales. Nous nous souvenons qu’à Séoul une partie de la nuit, au bar de l’hôtel, à l’issue d’une journée de travail chargée, nous échangions « jusqu’à   plus soif », avec Orest Nowosad et Marianne Haugaard  des souvenirs sur le long parcours des Institutions nationales.

v Paris -7-9 octobre 1991 :

Nous avons pris l’initiative d’organiser la première rencontre des « Institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme », les 7 à 9 octobre 1991, au Centre des conférences internationales à Paris, sous l’égide du Centre pour les droits de l’homme de l’ONU. Les institutions de 36 pays ont répondu à notre invitation.

Impressions : Pour l’origine, faisons remonter l’initiative de cette Rencontre à l’année 1989, lorsqu’au cours d’une conversation avec M. Hamid Gaham, représentant le Centre pour les droits de l’homme, nous tentions de répertorier les commissions homologues à la CNCDH française dans le monde, et que nous prenions connaissance des principes dégagés par le Séminaire de 1978 restés jusque- là sans suite. L’organisation des Rencontres de Paris, avec le soutien du Centre pour les droits de l’homme et du gouvernement français devait prendre plus d’un an. Les délégations étaient invitées à séjourner dans plusieurs petits hôtels de caractère autour de l’Arc de Triomphe de l’Etoile. La réunion se tenait au Centre de conférences internationales de l’avenue Kléber, mais la surprise fut de découvrir une salle qui venait d’être spécialement aménagée pour un sommet des chefs d’Etats du G-7 tenu quelques jours plus tôt. Nos hôtes étaient donc installés dans d’imposants fauteuils de cuir blanc, autour d’une gigantesque table pour soixante-six participants, surmontée de deux tribunes. Prirent ainsi place autour de la table, non seulement les Institutions nationales, Ombudsmans et Médiateurs, mais aussi les représentants des Nations unies, les ONG, et les autres observateurs, sous l’œil des représentants diplomatiques et de la presse installés sur les gradins.

Au deuxième jour des travaux, un déjeuner réunissait une dizaine de participants dans le restaurant du sous-sol du Centre Kléber. Dans le feu des idées échangées, l’expert M. Louis Joinet  et moi-même griffonnions  sur une nappe en papier, entre la poire et le fromage, une synthèse des principes dégagés en travaux, qui étaient ensuite présentés en séance plénière et adoptés. L’ébauche des « Principes de Paris » était ainsi adoptée, qui devaient plus tard être actés par l’Assemblée générale des Nations unies.

Les participants garderont un souvenir étonné et amusé de ce décorum, mais aussi des réceptions données par le Premier ministre et par le ministre des Affaires étrangères, particulièrement des déplacements dans Paris  en cars précédés de motards de la police, toutes sirènes hurlantes, à travers les rues encombrées du centre de la capitale, devenue, pur quelques heures, celle des droits de l’homme.

v Sydney (Australie)-19-23 avril 1993

 

Organisée dans le cadre de la mise en œuvre du programme d’action de la deuxième Décennie des Nations unies de lutte contre le racisme, cette rencontre des Institutions nationales visait à élargir leur compétence à ce thème

Impressions : Le souvenir de cette rencontre restera celui d’une soirée sur un bateau, dans la splendide baie de Sydney, face à l’architecture futuriste de l’opéra, et celui d’une démonstration musicale d’un groupe folklorique aborigène aux étranges instruments traditionnels  et aux mystérieux dessins de sable polychrome.

v Tunis -13-17 décembre 1993 :

La deuxième rencontre internationale se tenait du 13 au 17 décembre 1993 à Tunis (Tunisie) dans une conjoncture favorable, soit après la conférence mondiale de Vienne (1991), et de l’adoption des Principes de Paris par l’ECOSOC (1992)

Impressions : Lorsque nous sommes arrivés à l’aéroport de Tunis- El Aouina, nous avons été accueilli par des banderoles de bienvenue, l’une d’entre elles proclamant «  Tunis, capitale des droits de l’homme ». Siégeant dans un grand hôtel au cœur du parc boisé du Belvédère, nous avons eu également le loisir de découvrir  le centre de la capitale et l’avenue Habib Bourguiba, bordée de fleuristes et de terrasses de cafés animées, mais les statues imposantes qui marquaient jadis ses deux extrémités avaient disparu : l’une du Cardinal Lavigerie, donnant le dos à la Kasbah et montrant du doigt la direction de la mer, l’autre de Jules Ferry entouré d’enfants « indigènes » apprenant à lire. Elles étaient remplacées par les statues de Bourguiba et d’Ibn Khaldoun.

v Manille (Philippines)- 18-21 avril 1995

Cette troisième rencontre internationale tenue au Philippines du 18 au 21 avril 1995 réunissait dix-huit institutions des droits de l’homme, de la région Asie/pacifique (Inde, Indonésie, Philippines, Australie, Nouvelle Zélande),des Amériques ( Canada, Mexique),d’Afrique (Algérie, Maroc, Tunisie, Cameroun, Centrafrique, Sénégal, Togo), du Proche Orient (Koweït), et d’Europe (Suède, Turquie, France), ainsi que des observateurs officiels de Chine et du Japon.

Impressions : De toutes les images qui ont imprégné le souvenir de notre séjour à Manille, on en retiendra deux : Le Palais Malacanang où le président Ramos recevait les participants est d’une modestie qui tranche avec son appellation, nulle architecture exubérante, mais des intérieurs simples et fonctionnels. Mais c’est dans  les rues de Manille que le choc fut le plus grand, de découvrir, à la nuit tombante, des milliers d’enfants – filles et garçons- en errance, couchés dans des ruelles sombres et nauséabondes, à l’ombre d’hôtels luxueux, s’offrant à la prostitution sous les yeux indifférents des passants et des policiers. Seuls quelques militants d’ONG, parmi lesquels des Français que nous avons suivis dans leur tournée nocturne, sont au contact de ces «  enfants des rues » pour leur apporter des soins d’urgence, les héberger pour quelques nuits et tenter de les sortir de cet enfer en les accueillant dans des maisons spécialisées.

v Mérida-Yucatan, (Mexique)- 27-29 novembre 1997.

Quarante et une institutions nationales étaient présentes pour cette quatrième rencontre tenue à Mérida, dans le Yucatan mexicain du 27 au 29 novembre 1997, en présence de cent-cinquante participants venus des cinq continents Les travaux étaient ouvert par le Président du Mexique, M. Ernesto Zedillo Ponce de Léon. Une partie de ses travaux était consacrée à la protection des défenseurs des droits de l’homme partout dans le monde.

Impressions : Les participants à cette rencontre de Mérida étaient particulièrement impressionnés non seulement par la prévenance et le charme de Mme. Mireille Roccatti, présidente de la commission mexicaine hôte, mais aussi par les spectaculaires «  évènements sociaux » qui ont marqué ce séjour. La péninsule du Yucatan, haut lieu de la civilisation Maya, était propice à des découvertes archéologiques éblouissantes. Les travaux se sont achevés par un spectacle son et lumière dans la pyramide maya d’Uxmal, suivi d’un dîner en plein air, au pied du monument, offert par le gouverneur du Yucatan. Moment fort également lors de la visite du site de Chichèn itzá, et de ses sculptures gigantesques de serpents à plumes. Sans oublier la surprise enchantée des participants, à leur arrivée, accueillis par un orchestre de Mariachi en sombreros.  A la fierté d’un pays hôte de se montrer sous ses meilleurs atours, s’ajoutait  un état d’esprit chez les participants  pour lesquels ces travaux sont autant d’occasions de se rencontrer amicalement, de s’apprécier, de débattre dans un climat dénué de toute tension, ou compétition, pour un engagement commun en faveur des droits de l’homme

 

Paris-3-5 décembre 1998 :

 

Le cinquantième anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme était symboliquement marqué, du 2 au 5 décembre 1998 à Paris, où fut signée la DUDH, par un séminaire international auquel la CNCDH invitait  vingt-sept Institutions nationales venues des cinq continents. La rencontre était placée sous le haut patronage du Président de la République, M. Jacques Chirac. Les participants adoptèrent un « Manifeste sur l’universalité et l’indivisibilité des droits de l’homme ».

Impressions : En marge des travaux tenus à la Sorbonne, les invités de ce séminaire ont assisté, dans le prestigieux amphithéâtre Richelieu, à un concert donné par plus de cent musiciens et choristes qui ont interprété la V° Symphonie de Beethoven.  Ils eurent l’occasion de faire mieux connaissance au cours d’un dîner sur un bateau-mouche descendant la Seine, le long des grands monuments parisiens illuminés.

 

 

Rabat (Maroc)- 13-15 avril 2000 :

 

C’est sur le thème « Droits de l’homme et cultures » que ce tenait cette cinquième rencontre des Institutions nationales, à la veille de la conférence mondiale de Durban sur le racisme. L’occasion était donnée de dresser un bilan  de la création d’institutions nationales africaines, dont le nombre a triplé au cours des trois dernières années. La coopération régionale s’est amplifiée avec la mise en place de comités régionaux de coordination et la tenue de réunions régionales : Marrakech (Maroc) en avril 1998 ; Durban (Afrique du sud) en juin 1998 ; Kandy (Sri Lanka) en juin 1999 ; Manille (Philippines) en aout 1999 ; Tegucigalpa (Honduras) en septembre 1999 ; et Strasbourg (France) en mars 2000.

Impressions : La légendaire hospitalité et la générosité marocaines ont été illustrées au cours de ce séjour. La découverte de la Médina de Rabat, à l’occasion d’un dîner dans un ancien palais ; un déjeuner de clôture au Royal Golf  Dar Es Salam  permirent d’apprécier non seulement la subtile cuisine, et la musique traditionnelle marocaines, mais aussi une « fantasia » haute en couleurs et en bruits.

Copenhague (Danemark) et Lund (Suède) – 10-13 avril 2002 :

Outre qu’une telle rencontre des Institutions nationales se tenait pour la première fois  successivement dans deux pays voisins, celle-ci se consacrait à un bilan des travaux de la conférence mondiale de Durban sur le racisme, en réunissant une centaine de participants, et des Institutions nationales de soixante pays. Un règlement de nos conférences internationales était adopté.

Impressions : Les invités garderont une forte impression lorsque, dans des cars, nous passerons en moins d’une heure, d’un pays à l’autre en traversant un bras de la mer Baltique sur un pont d’une longueur  inusitée.

Genève (Suisse)- 10-11 décembre 2003 :

Parallèlement à leurs conférences internationales, et régionales, les Institutions nationales se réunissent pour tenir à Genève les réunions annuelles de leur Comité international de coordination (CIC), en marge des sessions de la Commission des droits de l’homme de l’ONU auxquelles elles participent. De plus, en ce décembre 2003, elles organisaient aux Nations unies de Genève, une table ronde marquant le dixième anniversaire de l’adoption des Principes de Paris.

Impressions : Des nombreux souvenirs personnels de ces réunions du CIC à Genève, nous retiendrons quelques images. Celle de la grande salle XVIII du sous- sol du Palais des Nations, face à la salle plénière de la Commission des droits de l’homme, où les seize Institutions membres du CIC prennent place autour des tables centrales, face au podium, entourées des observateurs et invités, et dont les travaux bénéficient d’un interprétariat simultané.

Celle d’un hall et d’une cafétéria attenante où les Institutions nationales, par petits groupes, prennent de multiples contacts autour d’un café, et des conciliabules entre les chefs de délégation et leurs «  sherpas », à la recherche de textes de consensus.

Celle d’une immense salle plénière de la Commission qui déroule imperturbablement ses travaux, dans un brouhaha sourd, et dont les participants sont filtrés par un service de sécurité courtois et vigilant, à l’entrée du «  bunker »

A l’heure du déjeuner, nous nous retrouvons dans le self-service du sous-sol, mêlés aux délégués des Etats et aux fonctionnaires des Nations unies, dans une salle à manger dont les baies vitrées s’ouvrent  sur le parc et ses paons en liberté avec vue  sur le magnifique lac Léman. La traditionnelle réception, donnée par le Haut- commissaire en l’honneur des Institutions nationales, au huitième étage de l’ancien Palais des Nations, est toujours d’occasion de contacts amicaux devant l’imposante chaîne du Mont-blanc couverte de neiges éternelles.

Séoul (Corée du sud)-14-17 septembre 2004 :

Cette rencontre de Séoul, en Asie,  qui respectait la rotation régionale des rencontres internationales, était ouverte par le Président de la République de Corée, M. Roh Moo-hyun, ancien militant des droits de l’homme persécuté par le régime précédent. La quasi-totalité de ses travaux était consacrée à la défense des droits de l’homme  dans les situations de conflits et dans la lutte contre le terrorisme. Cette session était précédée d’un forum des ONG s’exprimant de manière coordonnée.

Impressions : En marge des travaux Séoul les participants ont retiré l’impression contrastée d’une capitale dans laquelle se succèdent des pâtés de tours futuristes poussant à rythme accéléré, avec leurs galeries marchandes souterraines, et des quartiers traditionnels piétonniers, hauts en couleurs, proposant sur les trottoirs des soupes de la mer, des barbecues coréens, des milliers d’appareils électroniques asiatiques, des contrefaçons des meilleurs horlogers suisses ou des produits de luxe français, à des prix dérisoires. Il est évident que le «  petit dragon » de Corée est en passe de rejoindre les plus prospères économies asiatiques.

Parmi les conférences régionales des Institutions nationales, retenons quelques- unes auxquelles nous avons assisté, particulièrement en Afrique.

v Yaoundé (Cameroun)-5-7 février 1996 :

 

Dix Institutions nationales africaines se réunissaient pour la première fois, au cours d’une rencontre ouverte par le Premier ministre. L’un des thèmes à l’ordre du jour portait sur : « Les valeurs traditionnelles africaines : atouts ou handicap pour la promotion des droits de l’homme et de la démocratie en Afrique ? »

Impressions : Pour la première fois des chefs coutumiers et des «  rois » locaux, en grandes tenues d’apparat, assistaient à des débats sur les droits de l’homme, avec intérêt mais avec une difficulté évidente de parvenir à un langage commun.

Lomé (Togo)- 16 mars 2001 :

Cette troisième conférence régionale africaine, en présence de représentants de sept pays ayant le projet de créer une Institution nationale, se tenait au lendemain de la publication des conclusions d’une commission d’enquête ONU/OUA sur la découverte, en 1998, de cadavres sur les côtes du Togo et du Bénin voisin. Recevant les participants, le président  Eyadema niait toute implication de son pays, tout en constatant qu’il devait faire des progrès en matière de droits de l’homme.

Parallèlement à ce réseau onusien était créé à Lomé un nouveau réseau francophone des Institutions nationales des droits de l’homme.

Impressions : Cette conférence de Lomé a été marquée par une interrogation : Fallait-il la tenir dans ce pays dominé par une dictature militaire et à ce moment, d’autant plus que nous étions à la veille d’une consultation électorale ?

Un débat préalable s’était instauré entre les Institutions nationales, et particulièrement entre celle du Togo et le Haut -commissariat aux droits de l’homme (absent de la réunion). Les arguments avancés, pour et contre, étaient non seulement valables pour le Togo, mais aussi pour tout autre pays « en délicatesse » avec les droits de l’homme, qui postulerait à l’avenir. En venant à Lomé, sans illusion ou complaisance sur la situation nationale, les Institutions ont opté pour une promotion des droits de l’homme particulièrement nécessaire dans ces pays,  préférant à une politique de la «  chaise vide » une présence militante qui, loin de cautionner les manquements, les mettrait en lumière. Elles ont  décidé d’apporter ainsi leur soutien à une Commission nationale togolaise dont la tâche était  difficile, plutôt que de l’abandonner à elle-même. Cette conférence de Lomé a créé un précédent délicat à manier à l’avenir.

Par ailleurs, il était difficile, pour les participants, de refuser une invitation à rencontrer le président Eyadema. Mais la surprise fut de découvrit, en dernières minutes, qu’il s’agissait en réalité d’une invitation à assister au défilé militaire et civil marquant la journée nationale, à des places d’hôtes d’honneur apportant ainsi une caution des droits de l’homme. Les participants déclinèrent néanmoins une invitation du président Eyadema  à un banquet organisé à cette occasion dans une caserne. Nous n’avons pas voulu « dîner avec le diable avec une longue cuillère », selon l’expression de l’un des participants.

 

(Les contenus des travaux effectués lors de ces différentes manifestations sont détaillés dans l’ouvrage « Les Institutions nationales des droits de l’homme » de Gérard Fellous, aux éditions de La Documentation Française)

 

 

 

  • 24 juin 2009 – Crif

Gérard Fellous, consultant auprès des Nations unies et de l’Union européenne : « Il ne faut pas renoncer à faire évoluer le Conseil des droits de l’homme de l’ONU ».

 

 

La conférence internationale contre le racisme qui s’est déroulée dans l’enceinte de l’ONU à Genève s’est achevée le vendredi 24 avril 2009, avec les résultats que nous connaissons. Dès lors, les activités quotidiennes qui se tiennent d’ordinaire au Palais des Nations, ont repris. Notamment, les sessions du Conseil des droits de l’homme (CDH). En mai 2009, l’ONU a élu 18 nouveaux membres au Conseil, dont les Etats-Unis, un pays qui avait boycotté cet organe onusien depuis sa création en juin 2006. Doit-on saluer ce retour ?
Réponse : Incontestablement le retour des Etats-Unis au sein du Conseil répond à une logique, puisqu’en matière de droits de l’homme, les Etats-Unis s’expriment déjà à l’Assemblée générale et à la troisième commission. La politique de la chaise vide laisse la place libre aux plus extrémistes dans le système des Nations unies. Au poids diplomatique naturel des Etats-Unis, s’ajoute sa contribution financière décisive au Conseil et surtout le fait qu’ils renforcent le clan occidental soumis aux coups de butoir, tant de certains pays, comme la Chine, que de Cuba et surtout du groupe très agressif de l’Organisation de la conférence islamique (OCI).
La 11ème session du Conseil, qui a débuté le 2 juin et s’est terminée le vendredi 19 juin 2009, a été marquée par une série de tentatives destinées à affaiblir les instruments de défense des libertés. De l’avis général, un point de non-retour a été franchi lors de la session spéciale sur le Sri Lanka, fin mai. Colombo a réussi à imposer le principe de non-ingérence (alors que les Tamouls ont été massacrés au Sri Lanka) pour refuser une enquête indépendante sur place. Que vous inspire cette situation ?
Réponse : Très malheureusement, cette situation se reproduit régulièrement au sein du Conseil, particulièrement lors de crises graves en matière de droits de l’homme ou humanitaire. La position du Sri Lanka pour éviter une condamnation universelle est celle adoptée par tous les grands violateurs des droits de l’homme sur la planète. Le Sri Lanka argue des dispositions de la Charte des Nations unies qui préserve l’autorité des Etats sur leurs affaires intérieures, mais il faut constater que depuis 60 ans, l’ingérence dans les affaires intérieures et devenue une constante onusienne. Le temps ne tardera pas où le Conseil sera obligé de désigner un rapporteur spécial indépendant sur le Sri Lanka comme il l’a fait récemment pour le Soudan, ou pour la région des grands Lacs africains. Malheureusement, entre temps, des milliers de femmes et d’enfants ont été massacrés au Sri Lanka, les Nations unies n’ayant pas été en mesure à ce jour de créer une force d’intervention rapide humanitaire.
Le 18 juin, à Genève, l’avocate iranienne Shirin Ebadi, Prix Nobel de la paix en 2003 et directrice du Centre des défenseurs des droits de l’homme, une organisation non gouvernementale (ONG) interdite à Téhéran a été reçue par Navy Pillay, la haut-commissaire des Nations unies aux droits de l’homme. A cette occasion, elle a fait passer un message, expliquant qu’à travers ces manifestations le peuple iranien exprime avant tout ses espoirs et ses exigences de manière pacifique et qu’il faut à tout prix empêcher le gouvernement d’Ahmadinejad de continuer à faire usage de la violence. Attendez-vous quelque chose du Conseil des droits de l’homme au sujet de la situation en Iran ?
Réponse : La position courageuse de Mme Shirin Ebadi, -par ailleurs, rappelons le, Prix des droits de l’homme de la République Française, décernée par la Commission Nationale consultative des droits de l’homme- doit être soutenue par tous les Etats et ONG, particulièrement en France. Il est à craindre que le régime théocratique des Mollahs ne soit pas prêt à se réformer. Le plus grand espoir en Iran se trouve dans la jeunesse moins accessible au nationalisme et aux appels du fondamentalisme chiite. La réaction prévisible de l’ensemble de la classe politique iranienne sera certainement un repli sur soi et une diabolisation du monde extérieur particulièrement des Etats-Unis, de la Grande-Bretagne et de la France. Toutes tentatives au Conseil pour inscrire à l’ordre du jour la situation déplorable des droits de l’homme en Iran se heurtera au barrage dressé par l’OCI.
Faut-il réformer le CDH ou construire autre chose ?
Réponse : Incontestablement, il faut faire évoluer le Conseil. La réforme entreprise il y a quelques années de la Commission des droits de l’homme n’est pas un succès. Une nouvelle réforme pourrait porter d’une part, sur des structures plus indépendantes des Etats comme par exemple, les rapporteurs spéciaux, et d’autre part, sur le renforcement des ONG et des institutions nationales indépendantes, afin de modérer et de contrebalancer les réflexes protectionnistes des Etats violateurs. La victoire des droits de l’homme aux Nations unies est un long chemin qui est encore à conquérir.
Propos recueillis par Marc Knobel
Note :
Gérard Fellous fera paraître à la rentrée 2009, un ouvrage dont nous rendrons compte, sur les menaces qui pèsent sur l’universalité des droits de l’homme, particulièrement au travers du relativisme culturel et religieux.

 

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  • 19 décembre 2008 – Tribune libre dans le journal Le Monde

 

Droits humains fragilisés

L’extension de la notion de « diffamation des religions » n’est pas de bonne

Augure pour la prochaine conférence des Nations unies- Durban 2

 

par

Richard Prasquier

Président du Conseil représentatif

des institutions juives de France-CRIF

et

Gérard Fellous

Ancien Secrétaire général de la

Commission nationale consultative des droits de l’homme

 

Les droits de l’Homme survivront-ils encore longtemps en ce XXI e. siècle ? Soixante ans après la proclamation par l’ONU, à Paris, de la Déclaration universelle des droits de l’Homme (DUDH) les tentatives redoublent pour affaiblir le corpus de droit international né au lendemain de l’hécatombe de la Seconde guerre mondiale, sur les cendres de la Shoah. Et cette menace vient de l’intérieur même des Nations unies.

A-t-on entendu ce cri lancé le 6 octobre 2008 à Genève par le Haut commissaire des Nations unies pour les droits de l’Homme, Mme. Navanethem Pillay : «  Nous devons tirer les leçons de l’Holocauste » ? Elle ouvrait la session du Comité préparatoire (Prep Com) de ce qu’on appelle Durban-2, la conférence qui se tiendra à Genève en avril 2009 et qui aura pour mandat, huit ans après, d’analyser la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d’action  adoptés par la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et les diverses formes d’intolérance. Celle-ci, qui s’est tenue en Afrique du Sud à Durban du 6 au 9 septembre 2001, a laissé à certains participants un souvenir sinistre.

Verrons-nous revenir dans six mois, dans le moelleux du siège genevois de l’ONU, les outrances, insultes et excès qui firent de la conférence de Durban et, plus encore, du Forum des ONG associé, un chaudron de haine? Haine contre Israël, qualifié d’Etat raciste et accusé « d’actes de génocide », contre les Juifs aussi -pardon, les sionistes-  interdits de s’exprimer et traités de nazis, alors même que d’autres, les mêmes peut-être, regrettaient qu’Hitler n’eût pas fini « son travail »!

Les quelques espoirs qui avaient accompagné le remplacement d’une Commission déconsidérée par un Conseil des Droits de l’Homme se sont vite effacés, quand ce Conseil de 47 membres, contrôlé par une majorité automatique provenant de l’organisation islamiste mondiale (OCI) et de pays satellites, se spécialisa de façon répétitive dans les motions anti-israéliennes, ignorant quasi-complètement les violations les plus massives des droits de l’homme dans la planète, Darfour, Zimbabwe, Birmanie ou Corée du Nord, pour n’en citer que certaines. Le grotesque fut atteint quand le « Prep-com » fut doté d’une présidence libyenne et d’un bureau où siègent Cuba, Iran et Syrie que la bizarre logique onusienne semble accepter comme des parangons des libertés démocratiques et civiles.

En avril dernier le Conseil des droits de l’homme achevait sa septième session par le vote d’une résolution présentée par l’OCI modifiant le mandat du Rapporteur spécial sur la liberté d’opinion et d’expression. Désormais, pour cet expert, la priorité ne serait plus de promouvoir et de protéger cette liberté fondamentale, mais de limiter les libertés de la presse et de traquer la diffamation des religions.

Lors de la session d’octobre dernier, diverses contributions régionales ont étendu la notion de diffamation des religions et l’ont assimilée au racisme. Ainsi, l’OCI, une fois dénoncé l’abus de la liberté d’expression, qualifie de racisme toute «  restriction à une manifestation de l’Islam ». Or il faut bien distinguer critique des religions et incitation à la haine religieuse. Cette dernière seule est répréhensible.

 Les travaux du PrepCom se sont achevés le  17 octobre par un constat d’échec, puisque ce comité a renoncé à proposer un projet de document final pour Durban 2. Il s’est contenté de juxtaposer toutes les contributions, afin de ne pas édulcorer les positions les plus outrancières. Le résultat est un document inexploitable de 640 paragraphes, un fourre-tout censé faire plaisir à tous. Le texte est renvoyé à un« facilitateur » et un groupe restreint dont le travail risque de laisser le projet de texte final ignoré jusqu’aux derniers moments.

Mais un autre sujet de préoccupation réside dans les accréditations de dernière minute d’ONG islamiques et dans la possibilité, en marge des travaux de la conférence des Etats, d’un « Forum de la société civile », similaire à celui de Durban,  dont nulle autorité, ni le Haut commissariat pour les droits de l’homme de l’ONU, ni  la Suisse ne pourrait ou ne voudrait avoir le contrôle, et qui se livrerait aux mêmes débordements.

D’ores et déjà, certains états (Canada, Israël) ont préféré quitter ce qu’ils prévoient être une mascarade. D’autres (la France en fait partie) pèsent les avantages et les inconvénients d’une politique de la « chaise vide »

De multiples « lignes rouges » ont ainsi été posées depuis des mois afin que la conférence de Durban 2 ne puisse dégénérer. Le Président de la République, M. Nicolas Sarkozy déclarait devant le CRIF, le 13 février 2008 : «  Je n’accepterai pas que les dérives et outrances de 2001 se répètent… (La France) saura se désengager du processus si nos exigences ne sont pas prises en compte ». En sa qualité de présidente de l’Union européenne la France rappelait devant le PrepCom les limites à ne pas dépasser : ne pas rouvrir  les textes de Durban, particulièrement «  en cherchant à restreindre la liberté d’expression ni d’autres droits fondamentaux », et «  traiter la question du racisme sans politisation, sans polarisation, sans acharnement sur une région du monde en particulier ».

Ces «  lignes rouges » seront-elles respectées ? Les Etats européens réagiront-ils de façon univoque? Certains ne seront-ils pas tentés de négocier des compromis, dans lesquels, au prix de quelques avancées dans la société civile, ils accepteront d’inclure une nouvelle, unique – et par conséquent inique- dénonciation d’Israël? On peut le craindre.

Or, aussi biaisé et disqualifié que se soit révélé le Conseil des Droits de l’Homme, son nom seul suffit à donner crédibilité à une résolution de condamnation. Mais Israël n’est pas le seul en risque: l’Union européenne doit se mobiliser aussi face à ce danger majeur qu’est la remise en cause de l’universalité des droits de l’Homme.

 A la lumière de ce qui se passe à la veille de la conférence de Durban 2, on se rend compte que l’enjeu est de substituer à l’universalité de la DUDH, une vision différentialiste des droits de l’homme, un « relativisme ». On y remplacerait (art.18) la lutte contre toute discrimination d’une personne à raison de sa religion par la condamnation d’une parole critique contre une religion globalement désignée. L’ancien rapporteur de l’ONU contre le racisme proposait d’ailleurs de définir l’antisémitisme comme une forme de «  diffamation envers les religions », complétant un inacceptable amalgame

Cette remise en cause de l’Universalité des droits de l’homme –déjà tentée en  son temps par l’URSS- n’est pas légitime : pas seulement parce que 171 Etats se sont solennellement engagés à respecter les droits fondamentaux définis dans la Charte des Nations unies, mais surtout parce que leur substrat n’est pas une prétendue «  vision occidentale », mais bien la dignité de la personne humaine, celle qui est bafouée lorsqu’une femme est violée, une fillette excisée ou un voleur amputé.

Comme le disait en 1971 l’un des rédacteurs de la DUDH, René Cassin, «  il y a quelque chose dans chaque homme qui est universel ».

Le même  René Cassin qui soulignait en 1948 que  nul n’avait droit de dire que nous ne pouvons rien si les Nations Unies sont défaillantes, car » les Nations unies, c’est nous !  ». 

  • 21 mars 2005 – Le Monde- Entretien racisme.

 

En 2004 les actes racistes ont atteint

des niveaux « exceptionnels » en France,

selon Gérard Fellous

Manque URL S8

 

  • 11 juillet 2004- TV- Antisémitisme

 

 

Le Secrétaire général de la CNCDH, Gérard Fellous , a présenté à la télévision le rapport 2003 sur le racisme et la xénophobie en France :

 

Insérer vidéo S9

 

 

  • 11 juin 1997- Interview l’Humanité.

Gérard Fellous: «Le temps de la répression est passé»

 

 GERARD FELLOUS est secrétaire général de la Commission nationale consultative des droits de l’homme, dont les critères ont été retenus par Matignon pour régulariser les sans-papiers. Il répond à nos questions.

Comment accueillez-vous la décision, prise par Matignon, de régulariser les sans-papiers sur la base de vos critères?.

C’est une satisfaction totale. Certes, il ne s’agit que d’une mesure transitoire touchant un aspect très particulier du problème de l’immigration, celui des sans-papiers, et l’application de cette circulaire est d’ailleurs compatible avec la législation actuelle. Ce n’est donc qu’un début, mais il est prometteur. Le temps de la répression est passé. L’heure est à présent au dialogue, à l’élaboration d’une autre politique de l’immigration. Nous travaillons actuellement à un autre avis qui devrait, cette fois-ci, en poser les jalons.

Pourquoi Matignon a-t-il préféré vos critères à ceux qu’avait énoncé le collège des médiateurs?

Nos critères et ceux des médiateurs se recoupent presque totalement. Comme eux, nous avons élaboré notre avis à partir d’un constat: les lois avaient créé des sans-droits, des sans-papiers. Leur travail nous a été très précieux. Nous sommes restés en contact étroit: plusieurs d’entre eux, Stéphane Hessel, Paul Bouchet, par exemple, sont d’ailleurs membres à part entière de notre commission.

Le recours à des critères pour régulariser les sans-papiers n’a pas toujours fait l’unanimité. Certaines voix réclament d’ailleurs toujours une «régularisation globale». Qu’en pensez-vous?

Nous avons toujours pensé qu’on ne pouvait pas régulariser sans critères. D’ailleurs, contrairement à ce qui a été dit parfois, les opérations de régularisations massives menées en Espagne et en Italie répondaient, elles aussi, à des critères. Dans un Etat de droit, cette approche est fondamentale: elle est le gage de la transparence et du respect de l’équité. On ne devrait plus, comme par le passé, être confrontés à des décisions totalement différentes d’un département à l’autre. La logique qui prévaudra désormais est celle de la cohérence.

Peut-on penser qu’une telle décision favorise la poussée de l’extrême droite?

Ce type de préoccupation ne nous a pas effleurés lorsque nous avons élaboré notre avis. Elle a en revanche conduit à la politique menée jusqu’ici: on en voit les résultats. Notre seule préoccupation a toujours été le respect des droits de l’homme. C’est ce qu’il faudra expliquer si des réactions xénophobes se font entendre.