Gérard Fellous: «Le temps de la répression est passé»
GERARD FELLOUS est secrétaire général de la Commission nationale consultative des droits de l’homme, dont les critères ont été retenus par Matignon pour régulariser les sans-papiers. Il répond à nos questions.
Comment accueillez-vous la décision, prise par Matignon, de régulariser les sans-papiers sur la base de vos critères?.
C’est une satisfaction totale. Certes, il ne s’agit que d’une mesure transitoire touchant un aspect très particulier du problème de l’immigration, celui des sans-papiers, et l’application de cette circulaire est d’ailleurs compatible avec la législation actuelle. Ce n’est donc qu’un début, mais il est prometteur. Le temps de la répression est passé. L’heure est à présent au dialogue, à l’élaboration d’une autre politique de l’immigration. Nous travaillons actuellement à un autre avis qui devrait, cette fois-ci, en poser les jalons.
Pourquoi Matignon a-t-il préféré vos critères à ceux qu’avait énoncé le collège des médiateurs?
Nos critères et ceux des médiateurs se recoupent presque totalement. Comme eux, nous avons élaboré notre avis à partir d’un constat: les lois avaient créé des sans-droits, des sans-papiers. Leur travail nous a été très précieux. Nous sommes restés en contact étroit: plusieurs d’entre eux, Stéphane Hessel, Paul Bouchet, par exemple, sont d’ailleurs membres à part entière de notre commission.
Le recours à des critères pour régulariser les sans-papiers n’a pas toujours fait l’unanimité. Certaines voix réclament d’ailleurs toujours une «régularisation globale». Qu’en pensez-vous?
Nous avons toujours pensé qu’on ne pouvait pas régulariser sans critères. D’ailleurs, contrairement à ce qui a été dit parfois, les opérations de régularisations massives menées en Espagne et en Italie répondaient, elles aussi, à des critères. Dans un Etat de droit, cette approche est fondamentale: elle est le gage de la transparence et du respect de l’équité. On ne devrait plus, comme par le passé, être confrontés à des décisions totalement différentes d’un département à l’autre. La logique qui prévaudra désormais est celle de la cohérence.
Peut-on penser qu’une telle décision favorise la poussée de l’extrême droite?
Ce type de préoccupation ne nous a pas effleurés lorsque nous avons élaboré notre avis. Elle a en revanche conduit à la politique menée jusqu’ici: on en voit les résultats. Notre seule préoccupation a toujours été le respect des droits de l’homme. C’est ce qu’il faudra expliquer si des réactions xénophobes se font entendre.