LES MEDIATEURS,
ACTEURS DE LA BONNE GOUVERNANCE
Etude réalisée par Gérard FELLOUS, expert,
pour l’Association des Ombudsmans et Médiateurs de la Francophonie
réunie en 5ème congrès à Bamako (Mali) -
Afin de contribuer au deuxième Rapport de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF) sur l’état des pratiques de la démocratie, des droits de l’homme et des libertés dans l’espace francophone, Gérard Fellous a présenté en janvier 2007, une étude pour l’AOMF sur « Les Médiateurs acteurs de la bonne gouvernance » , dont on trouvera le texte ci-dessous.
Dans le prolongement des travaux effectués précédemment sur le thème de l’indépendance des Médiateurs par cet expert, en janvier 2006, cette étude est venue nourrir les débats du 5 eme congrès de l’AOMF tenu en décembre 2007 à Bamako.
Les principaux éléments de la « bonne gouvernance » sont définis par plusieurs instances internationales, comme par exemple l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Ils participent des engagements de la Francophonie, pris dans la Déclaration de Bamako et dans le dispositif d’observation et d’évaluation permanentes des pratiques de la démocratie, des droits et libertés dans l’espace francophone.
Les Médiateurs et Ombudsmans, réunis au sein de l’AOMF, jouent un rôle important dans la promotion et dans la mise en œuvre de ces principes de bonne gouvernance.
Les critères principaux.
On peut distinguer sept principaux éléments caractérisant la bonne gouvernance :
1 : L’obligation de rendre compte : Les administrations publiques doivent prendre l’engagement et être en mesure de montrer en quoi leur action et les décisions qu’elles prennent sont conformes à des objectifs précis et clairement énoncés ;
2 : La transparence : L’action , la prise de décisions et leur mise en œuvre, des administrations publiques sont , dans toute la mesure du possible, soumises à l’examen des autres secteurs de l’administration, du Parlement, de la société civile et , lorsqu’elles existent, d’institutions et d’autorités extérieures. Cet impératif de transparence fait partie de la lutte contre la corruption. ;
3 : L’efficience et l’efficacité : Les administrations publiques s’attachent à une production de qualité, notamment dans les services rendus aux citoyens, et veillent à ce que leurs prestations répondent aux politiques et objectifs énoncés par les responsables de l’action publique. Il s’agit en fait de la bonne gestion des affaires publiques ;
4 : La réceptivité ou réactivité : Les autorités publiques se dotent des moyens et de la flexibilité voulus pour répondre rapidement à l’évolution de la société. Elles tiennent compte des attentes de la société civile lorsque celles-ci reflètent l’intérêt général. Elles sont prêtes à procéder à un examen critique du rôle de l’Etat ;
5 : La prospective : Les autorités publiques doivent être en mesure d’anticiper les problèmes qui se poseront à partir de nouvelles données disponibles et compte tenu des tendances observées. Elles doivent être également capables d’élaborer des politiques qui tiennent compte de l’évolution des coûts et des changements prévisibles, tels que démographiques, économiques, environnementaux ou sociétaux. ;
6 : La primauté du droit : Les autorités publiques sont en charge de la mise en œuvre des lois et de l’application de la réglementation et des codes, et cela en toute égalité et en toute transparence. Leur action doit s’y conformer strictement et fidèlement. Elles sont en particulier les garantes du respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;
7 : La démocratie et la paix : Les autorités publiques participent activement et sans réserve à la mise en œuvre d’une vie démocratique apaisée.
Ces principes de bonne gouvernance sont constamment présents dans les principaux textes de la Francophonie, particulièrement dans la Déclaration de Bamako du 3 novembre 2000, ainsi que dans le programme d’action annexé à cette Déclaration, en octobre 2002, lors du Sommet des chefs d’Etat et de gouvernement francophones réuni à Beyrouth. Ils viennent s’insérer dans les engagements énoncés par ces textes, particulièrement en ce qui concerne la consolidation de l’Etat de droit, la gestion d’une vie politique apaisée ou la promotion d’une culture démocratique intériorisée et le plein respect des droits de l’homme.
Les objectifs inscrits dans les statuts de l’AOMF vont dans le même sens.
Le Médiateur européen, qui marquait dans son rapport 2005 ses dix ans d’existence au Conseil de l’Europe, retenait pour sa part la notion de « mauvaise administration » appliquée à un organisme public lorsque celui-ci « n’agit pas en conformité avec une règle ou un principe ayant pour lui force obligatoire ». Il faut souligner que la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, proclamée en décembre 2000, inclut le droit à une bonne administration au nombre des droits fondamentaux émanant de la citoyenneté européenne (article 41).
Par ailleurs, le Parlement européen a approuvé en septembre 2001, un « code de bonne conduite administrative » que les institutions et organes de l’Union européenne, leurs services administratifs et leurs fonctionnaires doivent respecter dans les relations avec le public. Ce code tient compte des principes du droit administratif européen contenus dans la jurisprudence communautaire et s’inspire des législations nationales. Ainsi, le Médiateur tient compte de ces règles et principes lorsqu’il se penche sur des plaintes et lorsqu’il mène des enquêtes d’initiative.
Dans les instances internationales.
Les Etats, de leur propre initiative ou sous la pression des organismes internationaux tels que la Banque Mondiale, mettent souvent en place une politique de la gouvernance. La Banque mondiale définit la gouvernance comme étant la manière dont le pouvoir est exercé dans la gestion des ressources économiques et sociales du pays.
Pour le PNUD –Programme des Nations unies pour le développement- (Mme. Linda Maguire, Groupe gouvernance démocratique) ,la gouvernance est un concept neutre comprenant les mécanismes, processus, relations et institutions complexes à travers desquels les citoyens et les groupes articulent leurs intérêts, exercent leurs droits et obligations et gèrent leurs différents. Le PNUD estime pour sa part que « la bonne gouvernance permet l’allocation et la gestion des ressources pour répondre aux problèmes collectifs ; elle est caractérisée par des principes de participation, de transparence, de responsabilité, d’Etat de droit, d’efficience, d’équité et de vision stratégique ». Ces principes portant également sur les garanties offertes par les droits de l’homme et l’Etat de droit, et des institutions transparentes et responsables.
Le PNUD ajoute que la « bonne » gouvernance, ou la gouvernance « démocratique » existe aussi là où les autorités gouvernementales s’appuient sur la volonté du peuple et sont responsables devant la loi. Elle existe là où des institutions transparentes et démocratiques permettent la pleine participation dans les affaires politiques et là où la protection des droits de l’homme garantit le droit d’expression, d’association et de contestation. Elle existe enfin là où le gouvernement et ses institutions défendent les pauvres et les plus vulnérables et promeuvent le développement humain de tous les citoyens. Un pays qui respecte les droits de l’homme et qui promeut la tolérance encourt moins de risques de voir les frustrations de ses citoyens atteindre un degré tel que le recours à la violence devienne un moyen de résoudre leurs problèmes, souligne le PNUD.
Ce programme des Nations unies apporte une contribution très importante dans la mise en place, dans les pays bénéficiaires, de services en matière de gouvernance démocratique. Répondant aux demandes et aux besoins des pays en développement, le PNUD propose par exemple un programme d’assistance pour l’administration et la réforme de la fonction publique. Il estime que la gouvernance démocratique est le moyen clé de parvenir à la réduction de la pauvreté, prise dans son sens humain. Pour atteindre ce but, les Nations unies misent sur la protection des droits de l’homme, la lutte contre la corruption, et la justice rapide et accessible.
Engagements des Etats.
De nombreux Etats francophones ont mis en place des politiques visant à assurer une bonne gouvernance.
*On peut citer le cas de la Tunisie, où le gouvernement a associé le développement économique, social et culturel de la société à la modernisation de la gestion publique s’articulant autour de trois axes prioritaires (M. Hamam Abdelatif, conseiller à la Primature de Tunisie) : -proximité et accessibilité des services publics ;-efficacité et efficience des interventions publiques, -équité et transparence. Ainsi la recherche d’une plus grande efficacité de l’administration publique en Tunisie s’accompagne de la mise en place de mécanismes adéquats permettant à l’autorité qui détient le pouvoir d’apprécier l’accomplissement des missions confiées, conformément aux objectifs fixés. Il est aussi dans l’ordre démocratique que tous ceux qui sont investis d’une responsabilité soient appelés à en rendre compte. Cette obligation se réfère au concept de « redevabilité » qui peut se définir comme étant « l’obligation de rendre compte de l’exercice d’une responsabilité ». Dans l’expérience tunisienne on constate que cette « redevabilité » n’est pas toujours une exigence qui s’impose à l’administration publique, et que sa mise en place devrait progresser en s’appuyant sur plusieurs outils parmi lesquels l’appréciation, par des autorités indépendantes et par la société civile, des résultats atteints dans la gestion des structures publiques et la satisfaction des utilisateurs. En Tunisie, la « redevabilité » peut être appréciée à la lumière de plusieurs rapports, parmi lesquels le rapport annuel de la Cour des comptes ou le rapport annuel du Médiateur administratif.
*Au Bénin, par exemple, la réforme administrative lancée fin 1994, occupe une priorité essentielle dans la conception et la mise en œuvre du programme de redressement économique lancé par le gouvernement. Les travaux de la réforme, poursuivis en octobre 1996, portaient sur le diagnostic de l’environnement institutionnel et en particulier sur la gouvernance qui fit l’objet de recommandations. L’objectif fixé était celui d’une administration transparente et responsable occupant une place centrale dans le dispositif de régulation du développement humain durable, ainsi que dans le renforcement de la démocratie et de l’Etat de droit.
* Au Mali, un nouveau souffle à la réforme de l’Etat a été donné dès octobre 2002, après des analyses sans concession. Ainsi il fut constaté (M. Diango Cissoko, ancien ministre de la Justice, Directeur du cabinet du Premier ministre) que la capacité de l’Etat de promouvoir le développement du pays et la gouvernance démocratique demeurait faible. Manquait alors un facteur essentiel à une dynamique véritable de développement durable, à savoir l’enracinement de la gouvernance démocratique, donc l’existence d’un Etat de droit dans lequel tous les acteurs, y compris l’Etat lui-même, sont soumis à la loi, où la gestion des affaires publiques est transparente, où les responsables ont le devoir de rendre compte de leurs actions, et où est effective la participation des citoyens et d’une société civile bien structurée, à la conception , à la mise en œuvre et à l’évaluation des politiques publiques de développement.
* En France, la politique de coopération institutionnelle a été inscrite dans la perspective élargie de la gouvernance démocratique, en apportant ainsi une contribution à la définition du concept de gouvernance, jusque là essentiellement attaché au bon fonctionnement du marché. (Malika Berack, Sous directrice pour le développement institutionnel. Ministère français des Affaires étrangères). Parmi les valeurs et principes avancés, la France inscrit, dans les règles de la gestion publique, l’obligation de rendre compte et l’examen par les pairs. Pour le ministère français des Affaires étrangères, la gouvernance démocratique propose une éthique de responsabilité et veut rompre avec les formes archaïques de domination ou de formes appauvries d’homogénéité culturelle et ethnique. Elle concourt à une intégration mondiale plus équitable et pacifique.
Le rôle des Médiateurs nationaux.
Agissant en toute indépendance (voir une précédente étude) les Médiateurs et Ombudsmans nationaux, membres de l’AOMF peuvent jouer un rôle déterminant dans la mise en œuvre de la bonne gouvernance et dans son contrôle à postériori. La définition même de leurs compétences les place à l’articulation entre la sphère administrative et les citoyens, non seulement pour débusquer les dysfonctionnements et les abus de l’administration, mais aussi pour, au-delà des cas particuliers, faire des propositions en vue de l’amélioration du fonctionnement de l’Etat.
Chacun des sept principaux éléments de la bonne gouvernance peut être vérifié et évalué par le Médiateur national dans le cadre de sa mission. Il serait à ce propos souhaitable que le texte constitutif de celui-ci indique explicitement dans ses missions ce rôle de vigie et de proposition pour une bonne gouvernance.
Ainsi par exemple, intervenant dans un différent entre un citoyen et une administration publique, le Médiateur ne peut résoudre un dossier que si cette administration publique se soumet à son obligation de rendre compte, faute de quoi il s’agira d’un dialogue de sourd ou d’un semblant de dialogue qui ne donnerait aucune suite aux recommandations du Médiateur.
De même, les décisions contestées d’une administration mise en cause doivent pouvoir être ouvertes à l’examen du Médiateur, en toute transparence. Ce dernier est alors à même de juger de l’efficience et de l’efficacité des services de qualité que l’administration doit rendre aux citoyens.
Les dysfonctionnements constatés par le Médiateur, lorsque leur nombre devient significatif dans un même domaine, et qu’ils font l’objet de propositions, ne peuvent être éradiqués que si l’administration fait preuve de réceptivité et accepte de faire son examen critique afin de modifier ses politiques et pratiques de manière prospective.
Enfin, la vocation première de l’action du Médiateur est d’être au service de la primauté du droit, veillant à l’application des lois et règlementations, à égalité pour tous, et en équité, en premier lieu en matière des droits de l’homme. Le rôle même du Médiateur qui s’emploie à désamorcer les conflits et tensions le met également en première ligne dans la mise en œuvre d’une vie démocratique apaisée.
Aussi est-il évident que le Médiateur est l’un des garants de la réalisation d’une bonne gouvernance. Il est vrai que ce rôle cardinal n’est pas toujours assumé explicitement et dans les priorités. Il n’en demeure pas moins que, dans les bonnes pratiques qui se dégagent des actions de chacun des Médiateurs, cette dimension est très souvent présente.
Bonnes pratiques.
- Le Médiateur de la République du Mali a ainsi, à la suite de l’une de ses recommandations du séminaire des 24-25 mars 2004 sur « la transparence dans l’action administrative », réalisé une étude pluridisciplinaire sur les dysfonctionnements de l’administration. Etaient pointés différents types de manquement comme par exemple l’absence de réponse aux courriers des administrés (obligation de rendre compte) ; l’absence d’écoute suffisante et d’assistance aux usagers (la transparence). L’une des recommandations présentée dans le rapport 2003-2004 porte sur l’accès aux pièces administratives et aux prestations fournies par l’administration et sur l’absence de services d’accueil et d’orientation des usagers, qui sont autant de manquements au principe de transparence, fondement d’une bonne gouvernance. Pour le professeur Modibo Keita, « c’est l’inflation juridique et règlementaire, dans un contexte d’oralité marqué par l’analphabétisme, qui nuit à la transparence et favorise la confusion…L’administration doit constamment chercher à promouvoir la transparence dans ses actions, au nom de la paix sociale, de la sécurité, du progrès ». Certaines pratiques doivent être instituées, comme par exemple le rappel des motivations et de la justification des décisions, souligne le rapport du Médiateur malien, qui a, au cours des années, organisé plusieurs séminaires de formation portant sur l’amélioration du fonctionnement de l’administration et sur la transparence dans l’action de l’Etat.
- Le Médiateur de la Républiquedu Sénégal précise, dans son dernier rapport de 2005, les avantages retirés par les deux parties : le citoyen qui fait redresser les dysfonctionnements de l’action administrative qui lui font grief ; l’administration qui corrige ses propres erreurs, assoit une jurisprudence, ce qui lui permet d’éviter la répétition de ces erreurs. De manière constante, le Médiateur sénégalais a fait des propositions de modifications des textes afin de mettre fin à des dysfonctionnements dans l’action de l’administration. Il a préconisé des pratiques positives portant sur l’accessibilité et l’efficacité de l’administration, pour l’égalité des citoyens devant la loi.
- Pour sa part, le Médiateur de la Républiquedu Congo souligne, dans son rapport d’aout 2006, que sa mission doit être la « mise en œuvre concrète et réaliste de la volonté de justice et d’équité conformément aux lois, aux règlements, aux conventions et aux normes de fonctionnement de la vie publique. La finalité sociale de justice pour tous est un objectif clairement inscrit dans les actions de tout programme d’activités du Médiateur de la République. Pour cela, il est retenu de tirer un trait sur le passé d’injustice constatée, mais non résolue faute d’institution non judiciaire chargée d’apporter à nos populations la marge de justice manquante aux citoyens lorsque l’entité génératrice de cette injustice est l’administration publique ». Le Médiateur congolais adhère au projet-programme « la nouvelle espérance » dans lequel le président de la République promeut la bonne gouvernance. Il s’agit en particulier de
« réformer en profondeur l’Etat par la bonne gouvernance, la restauration de son autorité et la transparence dans la gestion des affaires publiques ».
- Le Médiateur de la Républiquedu Gabon a organisé un séminaire de lancement d’un programme national de gouvernance et de lutte contre la corruption (décembre 2003). Parmi les recommandations principales adoptées on retiendra la mise en place d’une série d’indicateurs dont pourraient se servir les évaluateurs du Mécanisme africain d’évaluation par les pairs (MAEP), ainsi qu’une Charte sur la lutte contre la corruption et la promotion de l’intégrité.
- Le Médiateur du Royaume du Maroc (Diwan al Madhalim) a préconisé des pratiques répondant aux objectifs de Bamako, en particulier des propositions visant à sauvegarder les libertés individuelles et la garantie d’un procès équitable.
- Le Médiateur de la Cote d’Ivoire a préconisé des mesures appropriées pour l’enracinement de la démocratie, des droits et des libertés portant principalement sur : -la bonne gouvernance ;-l’indépendance de la commission électorale ;-le renforcement des partis politiques et du Parlement ;- l’instauration d’un dialogue constructif entre le gouvernement et la société civile ; – la liberté de la presse.
- Le Médiateur du Burkina Faso a organisé, en 2004, un séminaire réunissant l’administration, la société civile et les médias. Il a permis de faire un état des lieux des droits de l’homme, de la démocratie et de l’Etat de droit au Faso.
- Le Protecteur du citoyen d’Haïti a créé, au sein de son Office, une unité de protection des libertés, qui a adopté une série de dispositions protectrices. Il a de même lancé plusieurs projets de formation sur les droits et libertés, en particulier à l’intention des forces de police nationale.
- La Protectrice du citoyen du Québec souligne dans son rapport 2004-2005 que sa mission participe au renforcement de la démocratie et de l’Etat de droit. Elle constate néanmoins que l’administration admet difficilement ses erreurs et résiste à apporter les correctifs qui s’imposent. Par ailleurs, elle cite le cas de la nouvelle « loi sur les services correctionnels », adoptée depuis trois ans, qui n’a toujours pas trouvé d’application dans la réalité, constatant que « la situation continue de se dégrader dans les centres de détention », ce qui dénote un manque de réceptivité et de prospective de la part de l’administration pénitentiaire. L’institution du Protecteur du citoyen du Québec a montré une vigilance constante au regard du respect des droits des citoyens, de la transparence de l’administration publique, de la clarté et de la précision des communications écrites et verbales des services de l’administration publique.
- L’Avocat du peuple de Roumanie met l’accent, dans son rapport 2006, sur sa mission de contrôle de la constitutionnalité des lois et des ordonnances. Ainsi, au cours de l’année 2005, il a communiqué à la Cour constitutionnelle plus de mille points de vue sur des exceptions d’inconstitutionnalité ayant trait aux droits et aux libertés des personnes. Environ un quart de ces « points de vue » portait sur le libre accès à la justice, sur le droit à un procès équitable et sur le traitement des dossiers, par une juridiction indépendante, impartiale et instituée par la loi, dans un délai raisonnable. Au cours des années, l’Avocat du peuple de Roumanie s’est attaché à deux objectifs : – la réalisation d’un système efficient de garanties d’ordre économique, social, politique et juridique ; – l’accomplissement par les institutions de l’Etat de leurs responsabilités en ce qui concerne le respect de la Constitution.
- Pour la Médiatrice de la Vallée d’Aoste (rapport 2005-2006), « le Médiateur travaille pour la démocratie réelle, qu’il faut distinguer par rapport à la démocratie formelle ; or de nos jours il est généralement reconnu que c’est le respect des droits qui permet de mesurer la réalité de la démocratie ; de plus, bien que les indicateurs de la démocratie soient multiples, la démocratie suppose l’existence d’autorités publiques de contrôle, comme le sont les Médiateurs ». La Médiatrice d’Aoste ajoute que « les Etats, malgré la ratification des instruments internationaux, ne s’empressent pas toujours d’harmoniser leur législation, règlementation et pratiques administratives : c’est là que les Médiateurs peuvent jouer un rôle qui s’inscrit clairement dans les engagements que l’AOMF et ses membres ont pris ». Dès sa création, l’institution du Médiateur de la Vallée d’Aoste s’est investie dans un plan de réformes portant sur l’amélioration de l’activité administrative afin de redonner confiance aux citoyens dans les institutions étatiques. Elle a mené un travail en commun avec les fonctionnaires, l’administration et les associations de bénévoles, afin de mieux garantir le respect des droits et des libertés, et à protéger les catégories sociales les plus faibles.
- Le Médiateur de République de Macédoine constate, dans son rapport 2005, que
« l’administration publique continue de faire preuve d’inefficacité, d’inaction et de non intérêt bureaucratique pour les besoins des citoyens, et de prise de conscience de leurs droits ». Il préconise l’accélération du processus déjà lancé de réforme de l’administration publique et sa transformation en un véritable service pour les citoyens.
- Le Collège des médiateurs fédéraux de Belgique rappelle, dans son rapport 2005, que l’une de ses missions est de « contribuer à l’amélioration du fonctionnement des autorités administratives fédérales et promouvoir le droit à une bonne administration ». Ayant l’ambition de faire en sorte que leur propre fonctionnement soit un exemple pour l’administration publique, les Médiateurs fédéraux belges insistent sur les concepts-clés tels que l’efficience, l’efficacité, l’accessibilité, la disponibilité, la faculté de rendre compte. Au-delà du traitement des plaintes, les Médiateurs fédéraux entendent ainsi contribuer à l’amélioration du fonctionnement des autorités administratives fédérales.
- Le Médiateur de la communauté francophone de Belgique s’est employé à promouvoir la médiation parlementaire pour restaurer la confiance de l’administration dans ses institutions et dans les autorités publiques. Il a formulé vingt cinq recommandations à l’égard des pouvoirs publics afin d’apporter des modifications dans leurs pratiques, en vue de respecter les notions d’équité, d’égalité de traitement des usagers, de non discrimination.
- Le Médiateur de la République française inscrit dans son action constante le rétablissement du dialogue et de la confiance entre les citoyens et les administrations. Il encourage la transposition en droit interne des instruments et des normes internationaux en faveur des droits fondamentaux. Devant les difficultés que rencontrent les citoyens face à l’administration publique, particulièrement en matière d’information, le Médiateur a, à plusieurs reprises regretté la complexité et le foisonnement des lois et règlements.
Conclusion :
S’il est vrai que les misions que se fixent la quasi-totalité des Médiateurs et Ombudsmans de la Francophonie impliquent une vigilance constante face à l’administration publique et une volonté de favoriser des relations apaisées entre celle-ci et les citoyens ; s’il est vrai que leur indépendance les met en position de faire occasionnellement des propositions constructives mettant fin à des dysfonctionnements de l’Etat et de conquérir une crédibilité auprès des citoyens qu’ils s’efforcent de protéger, les Médiateurs et Ombudsmans n’ont pas à ce jour fait leur, explicitement les principes de la « bonne gouvernance », et ne se sont pas systématiquement impliqués dans sa promotion et dans sa protection. On a bien vu que cette « bonne gouvernance » est un impératif commun aux pays du Sud et aux pays développés. Elle doit donc être la préoccupation fédérative de tous les Médiateurs et Ombudsmans.
Il serait souhaitable alors qu’ensemble, dans le cadre de l’AOMF, ils se penchent, au cours d’une rencontre internationale, sur leur rôle dans l’avènement de la « bonne gouvernance ».
Janvier 2007- Gérard FELLOUS